Il n’y a actuellement aucun consensus au sujet du dépistage et du traitement de la persistance du canal artériel chez les extrêmes prématurés. Des variations de pratiques importantes sont observées selon les équipes allant d’une attitude conservatrice à un dépistage à un stade pré clinique, sans éléments de preuve de l’intérêt de ces variations de pratiques. Les données de la cohorte EPIPAGE 2 en population, au niveau national, suggèrent qu’un dépistage avant J3 pourrait réduire les risques de mortalité et d’hémorragie pulmonaire ; toutefois les méthodes statistiques utilisées pour limiter les effets des biais potentiels, propres à toute étude d’observation, montrent qu’il demeure une incertitude.
Résumé
Objectif : Il n’y a actuellement aucun consensus au sujet du dépistage et du traitement de la persistance du canal artériel. Des variations de pratique importantes sont observées allant d’une attitude conservatrice au dépistage à un stade pré clinique sans élément de preuve pour étayer ces variations. Notre objectif a été d’étudier l’association entre dépistage précoce et mortalité en cours d’hospitalisation.
Méthodes : Nous avons comparé les enfants de moins de 29 semaines dépistés et non dépistés inclus dans la cohorte EPIPAGE 2 ; cette cohorte en population incluait tous les enfants nés entre avril et décembre 2011 et hospitalisés dans 68 services de soins intensifs. Deux analyses ont été réalisées pour prendre en compte les biais de sélection potentiels, une méthode utilisant les scores de propension pour assurer l’appariement de chaque enfant dépisté à un enfant contrôle, l’autre utilisant la politique de dépistage précoce du service comme variable instrumentale.
L’indicateur de résultat principal était la mortalité entre J3 et la sortie d’hospitalisation. Les indicateurs secondaires portaient sur la morbidité sévère (hémorragie pulmonaire, broncho-dysplasie sévère, lésions cérébrales sévères et entérocolite nécrosante).
Résultats : Parmi les 1513 enfants pour lesquels on pouvait savoir s’ils avaient été ou non dépistés précocement, 847 ont été dépistés précocement et 666 ne l’ont pas été. 605 enfants dans chaque groupe ont pu être appariés. Les enfants dépistés ont été plus souvent traités (55,1% vs 43,1%), (Odds Ratio [OR], 1,62; Intervalle de confiance à 95% [CI], 1,31–2,00; Absolute Risk Reduction [ARR] pour 100 enfants, -12,0; 95% CI, -17,3 à -6,7). Les enfants dépistés avaient un taux plus bas de mortalité durant leur hospitalisation (14,2% versus 18,5% ; OR 0,73 [95% CI, 0,54–0,98]; ARR, 4,3 [95% CI, 0,3 – 8,3]) et un taux plus bas d’hémorragie pulmonaire (5,6% versus 8,9%; OR, 0,60 [95% CI, 0,38–0,95]; ARR, 3,3 [95% CI, 0.4 – 6.3]). Aucune différence n’a été observée dans les taux d’entérocolite nécrosante, de dysplasie broncho-pulmonaire sévère, ni de lésions cérébrales sévères. L’analyse fondée sur la variable instrumentale conduisait à un OR pour la mortalité durant l’hospitalisation de 0,62 [95% IC : 0,37-1,04].
Conclusions : Dans cette cohorte nationale en population, le dépistage échographique avant J3 des enfants très grands prématurés était associée à un risque de mortalité et d’hémorragie pulmonaire plus faible. Cependant les résultats de l’analyse utilisant une variable instrumentale conduisent à une incertitude dans l’interprétation ; une évaluation des effets à plus long terme est nécessaire pour clarifier ces résultats.
Pour lire l’étude
Rozé JC, Cambonie G, Marchand-Martin L, Gournay V, Durrmeyer X, Durox M, Storme L, Porcher R, Ancel PY, Hemodynamic EPIPAGE 2 Study Group. Association between early screening for patent ductus arteriosus and in-hospital mortality among extremely preterm infants
JAMA 2015;313:2441-8.
http://www.ncbi.nlm.nih.gov.gate2.inist.fr/pubmed/26103028